Un meurtre à caractère social engendre une contagion collective émotionnelle et punitive.
Sauf pour ceux qui accompagnés restent sujets et non dépersonnalisés.
Extraits de ma semaine d’accompagnements depuis ce mercredi, depuis que « nous sommes tous Charlie »
– Le soir même je suis allée boulevard Richard Lenoir. J’ai failli décliner ce rendez vous amical. J’y suis allée avec mes œillères de déni du moment juste après d’une telle catastrophe contre notre humanité. Et savez-vous ? Je suis rentrée à pied. J’ai parcouru ce trottoir tâche de sang, aussitôt recouvert de bougies et de fleurs. Et vous savez quoi ? J’ai ressenti beaucoup de paix.
– Comme vous ressentiriez la paix si vous osiez retourner sur les routes de votre enfance, tragique je le reconnais, mais tout autant recouverte de la vitalité que vous avez su depuis déployer…
– Je reconnais aussi moi qu’à chaque fois que vous tentez des liens entre mon présent et mon passé j’en suis horrifiée. C’est pourquoi je n’y vais pas souvent et vous le respectez.
– Vous y allez Katherina. Vous y allez à pied. Et nous avons le temps de voir fleurir pavés.
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– Est-ce que ces femmes entièrement voilées que je croise dans le métro pourraient comprendre qu’elles me heurtent en tant que femme autant que le prophète appelle sa non représentation ???
– Ces femmes, Enora, ces femmes vous imposent le plus intime de leur pensée en l’affichant…
– Ces femmes c’est moi petite quand je hurlais : c’est moi et non « votre enfant » ! Et qu’en rencontre en grande famille elles m’imposaient leurs you-you qui m’effrayaient de leur son.
– Il est toujours une raison personnelle à la haine ou la peur de l’autre et souvent les deux lorsque « personnel » ment : lorsqu’il n’a pas été permis, lorsque je tu(e) il et nous aliénant.
Nous sommes « tous Charlie » si un « je suis » est vivant.
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Et un Hors séance :
Je vois trébucher celui qui me précède dans les profondeurs d’un escalier du métro, je vois tomber cette femme que je croise dans le trottoir sur les Champs Elysées, je vois rue de la Victoire cette ado se prendre les pieds dans le cartable de sa copine et s’effondrer dans le caniveau. Je vois ce nouvel ami FB, chilien, qui me touche de son regard partagé d’étranger depuis le rassemblement, filmer l’homme au panneau « je suis Charlie » qui tombe bêtement. Il se rattrape au dernier instant. « No cae Charlie » est son commentaire alors.
Ils sont tombés à un combat qui aurait pu être mené autrement. Qui peut être mené autrement. C’est à chacun de nous de nous relever maintenant. Et de marcher longtemps.
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– La séance est terminée. Relevez vous et à la semaine prochaine.